La Nuit du tricheur

Publié le par Christine

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Ahhh la joie des rendez-vous, le frisson de l’attente, le plaisir de l’anticipation ! Lorsqu’on découvre au hasard des lectures un nouveau personnage, qu’on succombe à son charme, et qu’on devient acheteuse compulsive de tous les tomes existants, l’arrivée d’un nouvel opus est attendue aussi fébrilement que celle d’un soupirant !

L’heure est venue du troisième rendez-vous avec Workan, mon commissaire préféré.

Vous imaginez bien que je suis dans tous mes états, que je vérifie quinze fois si mes ongles sont propres et dignes de frôler le grand homme, que j’use toutes mes horloges en regardant pour vérifier si je suis bien à l’heure…

Oh la laaa  !!Cette fois, ça y est ! Il est là !

 

La Nuit du tricheur

Hugo BUAN

Pascal Galodé éditeurs ; 372 pages ; 17,90 euros

 

Crénom de nom, pourquoi il est toujours au fin fond du sac ce fichu rouge à lèvres ?

Rennes, charmante ville bretonne, qui résiste encore et toujours à l’envahisseur… Rennes, ses musées, ses tableaux célèbres, ses expositions renommées. Saviez-vous que l’une des plus belles toiles de Georges de la Tour se trouve au musée des Beaux Arts de Rennes ? Et qu’elle va faire l’objet d’une exposition prestigieuse en compagnie de quatre autres tableaux du grand maître ? Non ? Tsss, tss, quelle ignorance ! Une rétrospective G. de la Tour aura lieu à l’ancien couvent des Jacobins, concoctée avec amour par le personnel zélé du ministère de la Culture, préparée avec soin par tout ce que Rennes compte de spécialistes en la matière.

Mais bas les pattes !! Je vois d’ici votre œil briller de convoitise ! Le couvent des Jacobins va se transformer en savant mélange de Fort Knox et d’Alcatraz, avec un système de surveillance que Fort Meade nous envierait. Merci monsieur Chauvet !! Sécurité totalement inviolable,  il en est sûr, il a tout prévu. Tout !

Hum hum…. Pas tout, non.

Arrive de Paris dans une presque discrétion totale une drôle de bande de loulous. A sa tête, Fletcher. Il était l’artiste incompris de la famille, le canard boiteux à pinceaux, le mal-aimé de la lignée. Il est sorti de prison il y a quelques mois et a eu longuement le temps de ruminer. Il la tient enfin, sa revanche, et compte faire un coup d’éclat. Bon, les trois loustics qui l’accompagnent ne sont pas du genre violemment éclairés par une intelligence brillante, mais l’amitié, hein, c’est sacré.

Workan, quant à lui, doit obéir à son supérieur qui lui confie la lourde tâche de veiller au bon déroulement de l’exposition. Il se renseigne, visite, vérifie…se dit que normalement il n’y a rien à craindre.

Grave erreur.

Alors qu’il s’attend à un vol de tableaux, ou au moins à une tentative, c’est la découverte d’un cadavre barbotant dans un canal qui va mettre le feu aux poudres.

Un genre de pétard mouillé, quoi.

Parce que l’entourloupe, elle est ailleurs…Et  là, on n'y verra que du feu.

Que va bien pouvoir faire Workan lorsqu’il va réaliser que le fameux cambrioleur qui vient lui empoisonner l’existence n’est autre qu’un membre de sa famille ? Lointain cousin, certes, mais cousin quand même, et qui a longtemps été son souffre-douleur préféré…

Aïe aïe aïe, famille, je te hais !

 

Et mon sent-bon ? Il est où, mon sent-bon ?

Si j’ai pris un malin plaisir à insister sur le début de l’intrigue et à laisser la suite dans un flou artistique (normal, nous évoluons dans un cadre feutré, ouaté, fleurant bon l’essence de térébenthine et le pinceau en poil de martre)  c’est parce je préfère que vous ayez les effets de surprise liés aux nombreux rebondissements.

Parce que pour rebondir, ça rebondit bien ! Vous n’aurez le fin mot de l’histoire qu’aux toutes dernières pages et bien malin celui qui pourra se douter du modus operandi de cet audacieux cambriolage. Seul Fletcher en connaît les rouages, et il s’est bien gardé de dévoiler quoi que ce soit, même à ses partenaires, qui doivent subir sautes d’humeur et coups de poing avec une admirable abnégation.

Il y a toute une galerie de personnages pas piqués des hannetons, savoureux, déglingués, qui apparaissent au fur et à mesure pour permettre à l’auteur de nous sortir quelques belles formules dont il a le secret. Je le soupçonne de fréquenter des gens bizarres, pour avoir autant de points de repères aussi déjantés. Mais chut ! Cela reste entre nous !

Ils en finiraient presque par éclipser l’équipe de Workan, pourtant un modèle dans le genre « et que je râle et que je te dis des noms d’oiseaux, que je montre les dents mais que je t’aime bien quand même ».

Par contre, la documentation est tout ce qu’il y a de plus sérieuse, et vous allez apprendre plein de choses passionnantes, utiles …. ou non ? à moins que vous n’ayez des envies de cambriolage ?

Non, ne répondez surtout pas !! Je ne veux pas être accusée de complicité !!

Le style est plus sec, plus nerveux que dans les deux précédents livres

Hortensias blues et  Cézembre noire )  --cliquez sur les titres!!--

la narration est ici comme un fil tendu qui ne s’assouplit que pour quelques pauses.

Mais rassurez-vous, l’auteur n’a pas perdu son sens de l’humour, cette fois très viril et musclé, et les oreilles chastes ou les âmes sensibles sont priées de prendre une tisane calmante ou d’aller avoir leurs vapeurs ailleurs.

L’intrigue est encore une fois bien ficelée, et on se promène à droite et à gauche sans comprendre que l’auteur nous mène par le bout du nez. Vous connaîtrez Rennes comme le fond de votre poche et pourrez faire l’impasse sur l’achat d’un plan ou d’un guide touristique, mais pour deviner la chute …. Bernique !

Workan est là, avec sa mauvaise foi en inflation galopante, ses emportements et ses coups de gueule, sa belle Leïla presque en pâmoison devant Fletcher, ses soucis familiaux dont l’auteur nous dévoile quelques bribes.

Au troisième rendez-vous, c’est normal de commencer à connaître un peu mieux l’homme qui vient vous raconter sa vie et ses misères.

Bon, un rendez-vous par an, moi je veux bien.

Mais tout de même, un rendez-vous par an….c’est trop peu !

Workan, c’est bien parce que c’est vous et que décidément vous êtes un commissaire à part !!

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F
Même si les romans ne sont pas tous de qualités égale, c'est toujours plaisant à lire et frustrant à refermer.J'ai beaucoup aimé aussi les quelques livres où les apôtres saint Marc, saint Luc et<br /> saint Mathieu sévissaient. Espérons que la famille Vendermot deviennent comme eux, des récurrents.
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B
<br /> <br /> Hummm ..... N'y aurait-il pas confusion avec les livres de Fred Vargas: "Debout les morts" et "l'Armée furieuse" ?<br /> <br /> <br /> <br />