Séquestrée
« Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort. » Que voilà une bien belle phrase ! Merci Ô grand Nietzsche, merci Ah que Johnny ! Et merci aux amis qui nous l’assènent, en même temps qu’une tape amicale dans le dos, croyant bien faire lorsque nous affichons une mine déprimée. Et là je réponds :
Carabistouilles !
Foutaises !
Allez vous faire téter les yeux chez les hannetons !
Il reste toujours des traces, des plaies, des cicatrices plus ou moins apparentes mais qui démangent, encore, et encore…
Il y a toujours un « avant » et un « après ».
Et que celui ou celle qui n’a jamais chanté « I will survive, I will sur-vaïe-aïe-aïe-ve » en serrant les poings et en ravalant ses larmes recopie mille fois ce livre pour bien comprendre.
Séquestrée
Chevy STEVENS
L’Archipel (suspense)
334 pages ; 21 euros
Je suis d’accord pour tout vous raconter depuis le début, et si j’ai besoin de votre avis, c’est moi qui vous sonne. OK ?
Elle s’appelle Annie O’Sullivan. Un petit bout de bonne femme de trente-deux ans, d’un mètre cinquante-trois, qui vit à Clayton Falls sur l’île de Vancouver. Agent immobilier, dynamique, menant une vie somme toute banale, entre son amoureux, sa mère, sa meilleure amie, et Emma, sa chienne adorée. Bien sûr, comme pour tout un chacun, il y a eu de bons et de mauvais moments dans sa vie. Des drames et des joies. Rien que de très normal, donc.
À la fin d’une journée « portes ouvertes » pour faire visiter une maison, un inconnu se présente. Il a l’air plutôt avenant, un sourire agréable, la mine contrite d’arriver si tard. Annie le fait entrer.
Et tout bascule.
Annie est kidnappée et séquestrée.
Et je n’en dis pas plus.
Je me souviens d’avoir lu un jour que les oiseaux en cage ne partent pas tout de suite, même quand on leur ouvre la porte. Maintenant, je sais pourquoi.
J’imagine bien la question que vous vous posez : « Pourquoi arrêter là le résumé du livre ? »
Parce qu’il serait dommage de vous priver de ce qui m’a tenue éveillée toute une nuit pour arriver au dénouement.
Le style en lui-même n’a rien d’extraordinaire. Mais il colle tellement bien au personnage et à la manière de raconter l’intrigue qu’il est difficile de poser le livre une fois la lecture commencée.
Nous faisons la connaissance d’Annie lors de la première séance avec sa psy. Il serait plus juste de dire « un énième psy », mais celle-ci sera la bonne.
26 séances en tout, pendant lesquelles Annie va raconter ce qu’elle a vécu, et les conséquences sur sa vie « d’après ».
De manière directe, avec un franc-parler mêlé d’une rage et d’une angoisse perceptibles, elle nous fait entrer dans son histoire.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que le lecteur est tenu en haleine du début jusqu’à la fin.
Vous saurez tout, ou presque, de cette séquestration, des agissements de celui qu’elle a surnommé « le Monstre », des moments de doute, d’abattement, des stratégies élaborées pour résister.
Vous partagerez son étouffant huis-clos, son indignation, sa révolte, ses larmes, sa peur. Ses traumatismes.
Le récit alternant entre la période de l’enlèvement, et le retour à la vie « normale » (mais que peut être une vie normale pour Annie, après avoir vécu quelque chose d’aussi effroyable ?), vous saurez également comment progresse l’enquête.
Là encore, beaucoup de suspense. Et d’éléments qui n’ont pas fini de vous faire réagir.
Alors, que dire de ce livre ? L’étude psychologique du personnage est impeccable. Que ce soit les rapports entre Annie et son ravisseur, ou les liens avec les personnes qui lui sont proches, tout est d’une justesse qui fait froid dans le dos.
C’est donc un thriller, un très bon thriller, un excellent thriller ! qui ne cède pas à la facilité des rebondissements à sensation, mais qui utilise de manière très fine tout ce qui est source d’angoisse pour happer le lecteur et ne pas le lâcher avant la dernière page.
Un des meilleurs thrillers lus depuis le début de l’année !