Cadres noirs

Publié le par Bibliofractale

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Il n’y a pas que Dallas qui soit un univers impitoya-ha-bleuh (oui, la série que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître !) Voyez-vous, mes chatons, nous vivons dans un monde effroyable. Sans pitié. Cruel. Injuste. Vous aviez enfin trouvé une place libre pour garer votre voiture après 20 minutes de traque intensive ? Vous aviez mis votre clignotant, et tout bien fait comme il faut ? Bing ! Un malotru avec sa poubelle à quatre roues et une queue de tigre pendue au rétroviseur vous pique la place. Et vous toise en mâchant son cheouingue-gomme, en plus !

Injuste, je vous dis…

Et il y a pire !

 

 Cadres noirs

Pierre LEMAITRE

Calmann-Lévy ; 349 pages ; 18,50 euros

 

Ah, si je m’écoutais…. Et comment que je lui exploserais sa voiture, tiens !

Alain Delambre avait tout pour être heureux. Une femme qui l’aime et dont il est toujours sous le charme. Deux filles dont il est fier. Un bel appartement dont il reste quelques traites à payer. Et lui qui ne sait que travailler, il avait un boulot de RH dans lequel il s’investissait beaucoup pour assurer le bonheur de sa petite famille et un quotidien confortable. Il était un bon ! Parce que oui, bon, il était. Il l’est encore ! Mais cela ne sert plus à rien.

Delambre ne sert plus à rien car il a été licencié.

Alors au début, la famille se serre un peu la ceinture. Et puis le temps passe et aucune réponse positive à ses nombreux courriers pour trouver un nouveau job. Et puis le temps passe encore.  Alors il a fini par accepter un emploi plus que précaire. A 57 ans, il ne faut pas rêver ! Et même là tout va mal.

Puis l’inespéré se produit, il reçoit une convocation pour un entretien, il est fou de joie. Enfin du travail, un travail de RH, un vrai travail !  Lorsqu’on lui confirme qu’il n’y a plus qu’un test à passer et qu’il a toutes les chances d’obtenir le poste, il décide de mettre vraiment tous les atouts de son coté.

Parce que le test est du genre surprenant : les différents candidats au poste de RH devront évaluer quelques cadres de leur future entreprise en situation de prise d’otages !

Drôle de jeu de rôle….

Delambre commence à se renseigner sur la société qui demande un test aussi curieux, sur les autres candidats, sur  les cadres qu’il faudra évaluer. Delambre est un bon ! Et il est prêt à tout, mais vraiment à tout, pour avoir un nouveau travail.

Il croyait que ce serait suffisant ? Rien ne va se passer comme prévu.  

Delambre se rend compte que tout est déjà joué d’avance. Sans lui.

Pas question de se faire avoir, ah non !

Delambre, d’homme aux abois, devient un homme très, très en colère.

Comment Delambre réussira-t-il à tirer son épingle du jeu ?

 

 

Oui, mais non…. Je suis civilisée. Je ne lui explose pas sa voiture. Je l’explose, lui !

Nous avons là un roman qui fait froid dans le dos.

Tout d’abord parce que le début est criant de vérité. Alain Delambre, c’est l’un des trop nombreux chômeurs licenciés par une grosse société qui fait des profits, mais sacrifie l’humain pour faire encore plus de bénéfices. On le suit dans une sorte de descente aux enfers, on le voit évoluer, d’abord incrédule, puis résigné, puis révolté. Les mots sont justes. Les situations plus que crédibles. Les relations au sein de la famille, l’amour et la confiance qui aident à tenir, puis le mensonge qui arrive, peu à peu, pour voiler une réalité trop dure à supporter.

Arrive la partie jeu de rôle. Et là ça devient très rock’n roll, croyez-moi ! Vous n’avez pas fini de sursauter, les rebondissements sont nombreux. Vous pensiez que c’était terminé ?

Non.

L’auteur en remet un peu.

Et il distille ses effets de surprise, comme ça,  jusqu’à la fin du livre.

Et on sent qu’il s’amuse à le faire !

Et ça devient contagieux !

Bien sûr, c’est un roman sur fond « social », avec au début une mise en place plutôt classique et bien cadrée…. Mais ensuite, accrochez-vous à votre siège.

Delambre… Vous allez passer par toute une série d’interrogations au fur et à mesure de la lecture.

Qui est-il ? De quoi est-il capable ?

Est-il menteur ? Manipulateur ? Violent ?

Est-il humain, tout simplement ? Avec ses défauts et sa violente envie de s’en sortir ?

Comme c’est écrit à la première personne, vous allez entrer dans la peau de Delambre et vivre une sorte de grand-huit mélangé à une essoreuse.

Mais pas que. Car intervient en partie centrale un personnage qui prend la parole et donne un regard extérieur sur la façon dont le jeu de rôle a été conçu et comment il est parti en quenouille.

Le personnage de « méchant », l’homme de main de la société de recrutement, celui qui même en costume cravate n’arrive pas à dissimuler le mercenaire qu’il est, est l’adversaire idéal pour mettre la bonne dose de punch et d’adrénaline.

Bienvenu dans un monde de cynisme total et de manipulations abjectes !

Mais rien n’est joué d’avance….

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D
<br /> J'en garde un excellent souvenir... il y a là-dedans un soin du détail hallucinant. J'ai hâte de retrouver cet auteur.<br /> <br /> <br />
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B
<br /> <br /> Oui, et il y a quelques clins d'oeil bien vus par rapport à une actualité sociale qui est elle, hélas, bien réelle !  Quant aux pensées et ressentis du personnage principal, c'est bien<br /> campé, terriblement crédible.<br /> <br /> <br /> J'attends également le prochain livre avec curiosité et impatience.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />